Comment voir les aurores boréales? [Part. 2]
Comment voir les aurores boréales?
Maintenant que vous êtes là à attendre, dans le froid polaire, loin de toutes sources lumineuses, vous devez probablement vous demander quoi faire et où regarder. Il est important que le lieux soit bien dégagé vers le Nord, car c’est dans cette direction qu’il faudra regarder et que les aurores devraient apparaître.
Au début de la soirée, on observe généralement un oval assez léger et blanchâtre, semblable à un long nuage. Même s’il n’est pas visible à l’œil nu, je vous suggère de faire régulièrement des photos en direction du Nord, car le capteur de l’appareil photo est beaucoup plus sensible que l’œil humain durant la nuit. Il se pourrait qu’il capte des lueurs vertes qui seront annonciatrices du début du spectacle.
Il faut imaginer que cet oval se charge au cours de la soirée avant d’exploser. L’explosion peut durer entre quelques minutes et quelques dizaines de minutes, et constitue généralement le moment le plus intense de la soirée.
Généralement, quand les aurores commencent à être actives, des rideaux se forment dans le ciel. Ces derniers peuvent être plus ou moins colorés et bouger plus ou moins rapidement.
Quand les conditions solaires sont très fortes, l’oval s’étend et il peut alors être visible en direction du nord, au dessus, et même au sud. Si l’explosion se produit au dessus, on peut observer le phénomène appelé communément corona.
En fin de soirée, lorsque les conditions solaires s’atténuent, on peut observer les aurores pulsatiles. Ces aurores prennent la forme de patches légèrement colorés qui s’allument et s’éteignent rapidement.
Lors de très fortes tempêtes solaires, on peut observer ce qu’on appelle l’arc SAR. Une masse rouge parfois visible jusqu’à basse attitude, comme c’était le cas le 10 mai 24. Cette nuit a permis également d’observer les aurores à protons, tâches vertes à l’apparition furtive.
Un autre phénomène particulier semblable à des aurores boréales peut être visible. Malheureusement, n’en ayant jamais observé, je ne peux pas vous montrer de photo ici. Son petit nom, c’est STEVE (pour Strong Thermal Emission Velocity Enhancement). STEVE prend la forme d’une longue bande rosée, perpendiculaire aux pics verts formés dans les formations en rideaux. Ce phénomène particulièrement rare n’a été que récemment décrit (2016) et reste assez méconnu.
2. Les aurores boréales sont-elles visibles à l’oeil nu?
C’est une question qui se pose régulièrement, et dont la réponse peut paraître étonnante. En effet, et au risque de vous décevoir, la plupart du temps les aurores ne sont pas vraiment vertes à l’oeil nu. Cependant, le vert, le rose, le rouge et parfois le bleu visibles sur les photos existent bel et bien, et ne sont pas le résultat du photographe qui a forcé sur la saturation. C’est de cette manière que les aurores apparaissent sur l’appareil.
En réalité, l’oeil humain voit quasiment en noir et blanc la nuit, tandis que le capteur de l’appareil, lui, n’a aucun mal à saisir les couleurs. C’est ce qui explique ces différences de perceptions.
De plus, l’oeil humain est extrêmement sensible aux perturbations. Pour voir correctement les aurores, il faut que l’oeil soit habitué à l’obscurité et ce processus est très long. Il faut en moyenne 30 minutes à nos yeux pour être totalement sensibles la nuit, et à chaque contact avec une forte source lumineuse (votre portable par exemple), ce compteur redémarre à 0. Pour éviter tout dommage, préférez le mode rouge sur vos frontales et mettez de côté votre téléphone.
Chaque lumière risque de perturber votre observation des aurores. Lors des nuits de pleine lune par exemple, les aurores seront beaucoup moins visibles. Il faut à tout prix s’éloigner des lumières pour profiter un maximum du spectacle. Plus la nuit est sombre, plus les aurores seront colorées et visibles à l’oeil nu.
En début de soirée, les aurores sont souvent très faibles et peu colorées, semblables à des nuages. Si les conditions solaires sont bonnes et que les aurores deviennent plus fortes, elles prendront alors des teintes verdâtres qui s’intensifieront à mesure que la nuit avance. Les teintes de rose sont rarement visible à l’oeil nu, mais lors de fortes tempêtes, il est possible de distinguer ces couleurs.
Est-ce que les aurores bougent?
C’est la seconde question qui revient le plus souvent lorsqu’on parle des aurores. Oui, les aurores bougent, et elles peuvent même bouger très vite. En général, lorsque l’oval se créée en début de soirée, ce dernier est statique et aucun mouvement ne peut être perçu. Lorsque les rideaux se développent, le ciel se met à danser et à onduler. Lorsque les aurores sont très fortes, le ciel semble s’embraser.
3. Peut-on prédire les aurores ?
Cette partie fera l’objet d’un article plus long et plus complet, l’idée ici étant d’aller à l’essentiel. (Bz, densité, vitesse, puissance hémisphérique… vous saurez tout !)
La réponse courte, c’est qu’on peut les prédire, mais pas complètement. Selon plusieurs temporalités liées aux méthodes utilisées.
Prédire les aurores est un exercice périlleux et particulièrement complexe. Des instituts scientifiques comme NOAA travaillent à temps plein pour décrire et prédire la météo solaire qui conduira à l’apparition des aurores, et induira leur force.
On distingue trois types de prévisions :
Les prévisions à 28 jours, qui se basent sur des observations du soleil sur les mois précédents et sur l’observation de la face visible du soleil. Ce sont les prévisions les moins précises mais elles donnent une tendance à moyen terme.
Les prévisions à 3 jours, qui s’appuient sur l’observation du soleil et des éruption récentes. Les particules mettent entre 2 et 5 jours à traverser le système solaire et toucher la Terre, en fonction de la puissance de l’éruption et de la vitesse des particules. NOAA calcule la trajectoire et la force de l’eruption, pour définir ensuite des prévisions. Ces calculs sont très difficiles et, bien que ces prévisions soient très souvent exactes, il arrive que des erreurs surviennent.
L’observation à 45 minutes, s’appuie sur les données reçues par un satellite qui est en permanence entre le soleil et la Terre. Elle permet de connaître avec précision le flux de particules qui arrive sur Terre (densité, vitesse…).
Il en résulte de la définition d’un indice appelé KP. C’est l’indice de perturbation du champs magnétique terrestre, qui s’échelonne de 0 à 9. Plus le champs magnétique terrestre est perturbé, plus haut sera le KP.
Lorsque le KP est très élevé, cela signifie qu’une forte tempête est solaire doit toucher la Terre. L’oval auroral s’étend ainsi très loin, et on peut espérer apercevoir des aurores jusqu’en France, comme ça a été le cas en février 2023 où j’ai pu photographier les lumières nordiques à Etretat ! (une première !)
edit: ça a été le cas aussi en mai 24, mais ça, je ne le savais pas encore en écrivant cet article!
Attention cependant, un KP faible ne signifie pas qu’il n’y aura pas d’aurores. Pour le comprendre, il faut s’attacher au sens de cet indexe; le P, signifie Planetary. L’indexe KP est donc une moyenne de la perturbation du champs magnétique sur l’ensemble de la planète. Localement, les magnétomètre enregistrent l’indice K, et de très fortes variations peuvent apparaître. Il n’est par rare que le magnétomètre de Kiruna enregistre des K6, alors que les prévisions indiquaient un KP2 ou KP3. C’est tout à fait normal car il se peut que plus loin, en Sibérie par exemple, les conditions locales ne soient que de K1 ou K2. La perturbation du champs magnétique terrestre sera donc tirée vers le bas.
S’il fait beau, sortez et soyez patient. Même si l’indice KP affiché n’est que de 2 ou 3, il se pourrait que vous ayez une belle surprise !
Dans les prochains articles, nous parlerons des meilleurs applications mobiles pour suivre les aurores, comment bien préparer son sac et son voyage, comment lire et comprendre les données sur les particules émises du soleil et plein d’autres choses ! Stay tuned !
Des questions? Des précisions ? N’hésitez pas à me demander en commentaire !